Journées du 3 au 4 juillet : Ua Pou
 
 
Nous partons pour une promenade vers Hakateau, de l’autre coté de l’île.  Bien entendu, le plus dur de la marche se fera à midi, sur un chemin sans ombre… Arrivés là-bas, on comprend vite que c’est là que l’on aurait dû venir se mouiller ; tout le monde est sympa, nous salue, et on se met à parler de tout, de rien.  On aperçoit des affiches annonçant une séance de cinéma ! Surpris, on cherche un peu.  On trouve l’organisateur, en train de colmater un grand hangar avec des bâches pour créer une salle de projection.  N’ayant rien à faire d’autre, on l’aide un peu.  Il fait régulièrement le tour de l’île, dans la vedette du pasteur protestant d’Hakateau, dont le frère prête les projecteurs de 16 mm qui servent à la projection.  La projection à lieu ce soir, et si on reste, on ne pourra plus rentrer cette nuit sur le bateau…Dilemme, dilemme.  

Le projectionniste nous conseille d’aller voir Etienne, qui tient une pension, et qui pourra sûrement nous loger.  Etienne, c’est l’ex-prof du village, l’ex-maire aussi.  Ce soir, avec toute sa famille, il organise un repas à l’occasion de la séance de cinéma ; les bénéfices seront consacrés à l’organisation de colonies de vacances ouvertes aux enfants de l’île.  Comme souvent, tout se fait sans qu’un mot soit échangé sur le sujet, nous allons rester, dormir chez Etienne sans payer quoi que ce soit, et participer à l’organisation de la soirée.  En douze heures, on connaît la moitié du village !  Ca c’est de l’intégration ! Etienne est un personnage fabuleux : il anime le comité de la culture marquisienne, s’occupant principalement du sous-comité « langue marquisienne », qui tente de moderniser le marquisien, pour l’adapter à la vie moderne, et en promouvoir l’usage.  Il nous parle du renouveau marquisien, de la prise de conscience, récente, du potentiel de leur culture.  Sa leçon est reproduite dans notre sujet « marquises ». Lisez lisez.   

Au cinéma, il y a « Flubber » en première partie.  Robin Williams fait pleurer de rire les gosses assis par terre ; l’humour sans frontières… Nous on s’empiffre,  en enrichissant la colonie de vacances à chaque morceau de gâteau (car là on paye bien entendu…).   Après il y a « GI Jane », avec Demi Moore …Là, le fossé culturel paraît plus évident ; ceci dit c’est plutôt une preuve de bon goût que de s’endormir pendant ce grand spectacle américain fade un scénario d’Hélène.  On papote avec des équipages mouillés dans la baie, une famille américaine, qui a fait de la glace, de la vraie, pour la soirée et trois français.  A une heure, après avoir rangé les restes du repas, on s’endort dans la véranda de Etienne, devant la télé, détail important… 

Parce qu’Etienne, féru de culture marquisienne, n’en est pas moins amateur de foot.  Et aujourd’hui, quart de finale Pays-Bas/Argentine de grand matin, vu le décalage horaire.  On est réveillé par ce remake de la finale de 78 à cinq heures du matin.  Pays-Bas vainqueurs, revanche !   On démonte la salle de cinéma.  Puis Allemagne-Croatie, débandade germanique… Et on se met en quête d’un moyen de rejoindre Ataram.  Il pleut à verse, une voiture serait la bienvenue.  Martin ira à Hakau si le Taporo accoste aujourd’hui (le Taporo est un des navires d’approvisionnement des îles, que l’on appelle encore les « goélettes », bien que les chevaux-vapeurs aient depuis longtemps remplacé le vent comme force de propulsion, ils relient plusieurs fois par mois les îles à Papeete).  Mais le Taporo ne viendra pas… Reste la voiture de l’évêque des Marquises, en tournée d’adieu chez ses brebis marquisienne avant de prendre sa retraite.  Mais il n’y a plus de place dans sa voiture, le salut ne viendra pas de Monseigneur.  A 14 heures, contrordre, le Taporo aborde, Martin peut nous emmener.  Une heure de trajet à l’arrière du pick-up sous la pluie battante : c’est qu’on aurait froid ma parole !  En fin d’après-midi, on finit de frissonner dans Ataram, puissant pour la première fois dans notre stock de soupe.  Le Taporo décharge à quelques mètres, et des petits hommes jaunes s’activent dans le déluge.