Journée du  20 juin : Atuona (les Marquises)
 
 
Le lendemain nous trouve errant dans une ville déserte.  Le week-end n’est pas jour de sortie mais plutôt d’exil dans les montagnes ou de coconing pour les gens « de la ville ».  Heureusement, on croise des français expatriés qui nous vantent les charmes de leur village, à quelques heures de marche de là.  On y part en fin de matinée, ce qui nous permet de nous trouver à nouveau en train de faire de la marche en montagne sous le soleil de midi.  Ca devient une habitude !  Le village valait le déplacement.  Niché au débouché d’une vallée, au bord de l’océan et au pied des montagnes qui forment le demi-cirque de la baie dont Atuona occupe l’autre coté, il vraiment très beau.  En plus ici, le week-end, tout le village, enfants, femmes, ado, veillards, hommes, se réunit sur la plage pour la journée pour jouer au football, au volley, et faire de grands festins.  Les matchs mêlent les âges et les sexes, et sont l’occasion de grands éclats de rires des joueurs comme des spectateurs.  Pour se refroidir, les enfants vont faire un peu de body board dans les vagues pendant que les mamas préparent le festin.  La belle vie pour toute la communauté !  Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ils connaissent leur chance : ils savent que pas très loin, à Papeete, des gens vivent dans le stress, isolés de leur famille, payent leur fruit et leur poisson.  Les jeunes nous vantent leur vie « cool », libre.  Il doit bien avoir un défaut, mais on ne l’aperçoit pas vraiment.  Enfin si, en creusant un peu, on se rend compte que leur vie est tellement cool que parfois, ils s’embêtent un peu les jeunes. Du coup ils boivent.  Beaucoup, jusqu’à être assommé.   Cyril, avec qui on fait connaissance, nous invite d’ailleurs à fêter la fête des pères à leur manière, en « buvant jusqu'à la mort ».  Pas certains de tenir la distance avec ces brutes surentrainées, on ne promet pas d’être là…   

Près du village, se trouve un des plus grands marae de Polynésie.  Ce centre de la vie culturelle et religieuse des anciens polynésiens se trouve dans le fond de la vallée, là où se trouvait jadis les villages.  Nous marchons une petite heure pour arriver sur ce site qui pourrait devenir le « Machu pichu » des Marquises s’il était dégagé de la végétation qui l’envahit.  Seule une petite partie à fait l’objet d’une mise en valeur ; elle permet de mesurer l’ampleur des constructions que l’on devine.  Une atmosphère très forte se dégage de cet endroit alors que le jour tombe, mais encore plus forts, les centaines de moustiques qui profitent de l’aubaine que constitue nos chairs fraîches nous poussent à battre en retraite.   

Bien entendu la nuit tombe alors que nous ne sommes pas à la moitié du chemin.  Heureusement, un pick-up passe, un pouce tendu, et hop, nous voilà rendu au bateau.  De plus, c’est une famille de cueilleurs de fruit qui nous a emmené, et on reçoit des sacs entiers d’oranges.  Pas question de refuser, même nos « mercis » empressés paraissent incongrus à ces gens pour qui le partage des ressources naturelles est une évidence ancestrale.  Le langage marquisien ne comprenait d’ailleurs pas le mot « merci », car le don était naturel, tant que son objet était le fruit de la nature.  Le donataire ne faisait que recueillir un bien commun, et le don était un partage normal. Cet esprit baigne toujours les relations avec les Marquisiens.  C’est très agréable et on finit soi–même par réapprendre a donner sans aucune arrière pensée, sans espoir caché de réciprocité.