La
plus importante des fêtes religieuses de l’île était
assurément celle du Tangata Manu (l’homme-oiseau) qui se déroulait
une fois l’an, à Orongo, village cérémoniel qui s’élève
sur la crète du volcan Rano Kao. Le choix de ce site s’explique
par sa proximité avec les trois îlots de Motu Nui, Motu Iti
et Motu Kao Kao, refuge sur lequel venaient pondre les hirondelles de mer.
Il s’agissait d’un véritable concours organisé pour la quête
du premier œuf pondu par l’hirondelle de mer sur l’îlot Motu Nui.
 Les
candidats étaient désignés par les prêtres mais
seuls les chefs de guerre pouvaient être choisis. Ceux-ci pouvaient
cependant, une fois désignés, confier la tâche à
un de leurs serviteurs, les Hopu.
C’est au mois d’août que les dénicheurs quittaient Orongo pour le Motu Nui. Cette épreuve nécessitait de réelles capacités physiques et morales car l’îlot, distant d’environ 2 Km est d’accès périlleux et la mer y est infestée de requins. Les nageurs utilisaient des flotteurs coniques en joncs à l’intérieur desquels ils emportaient des vivres en prévision d’un long séjour. Après leur installation dans les petites grottes de l’îlot, ils étaient ravitaillés par des parents ou des serviteurs. Tandis que les candidats guettaient la première ponte de l’hirondelle de mer, de nombreuses cérémonies se déroulaient à Orongo afin de concilier les divinités. On dansait et les tangata rongo récitaient jour et nuit des chants cadencés. Des offrandes étaient offertes aux dieux Make Make et Haua. Celui qui trouvait le premier œuf se précipitait sur le rocher appelé "le cri de l’oiseau" et hurlait son nom ou celui de son maître. Ce cri était entendu par le guetteur posté dans une grotte de la falaise d’Orongo qui répandait aussitôt la nouvelle. Le retour s’effectuait alors rapidement et sans danger, le nageur évoluant désormais sans craintes dans les eaux périlleuses puisque désormais protégé par les vertus magiques de l’œuf et par les dieux.  Le
vainqueur devenait homme-oiseau et par la-même une sorte de demi
dieu. Il redescendait au village de Mataveri à la tête
d’un tumultueux cortège et à nouveau, danses et chants se
succèdaient mais cette fois, des victimes humaines, désignées
par les prêtres ou l’homme-oiseau lui même étaient sacrifiées.
Ensuite, l’homme-oiseau se retirait pour un an dans une maison au pied du volcan, il changeait son nom et en donnait un à la nouvelle année qui commençait. Soumis à des tabous très stricts, il ne pouvait s’éloigner de sa retraite, les bains lui étaient interdits, il ne pouvait se nourrir que de nourritures cuites dans un four spécial par un serviteur particulier. Ses ongles et ses cheveux devaient pousser l’année entière sans être coupés … Durant l’année de son règne, il tirait de sa position de nombreux avantages économiques et politiques. Au bout d’un an, l’œuf perdait ses pouvoirs, l’homme-oiseau quittait sa retraite et retournait à ses occupations d’autrefois. Il sera enterré en un lieu sacré, avec les autres hommes-oiseaux. |